GÉNÉALOGIE - 11 : histoire de prénoms (2)

Publié le par Marcel Le Boïté

Textes écrits ou rapportés par Marcel Le Boïté

RE-NAISSANCE

Le thème de la « seconde naissance » occupe une part-clé de l'ésotérisme chrétien, et le prénom René entretenait, dans les premiers siècles du christianisme, cet écho religieux et métaphysique. Ce très vieux prénom, même s'il semble aujourd'hui moins porté, n'a cependant jamais cessé d'être utilisé, surtout en France, en Allemagne et en Italie, où la forme de Renate, Renato et Renata (Renée) continuent d'avoir cours. Remarquons qu'à la fin du Moyen-âge, le renouveau artistique européen s'est appelé Renaissance, car il avait pour but de retrouver ce que l'on pensait avoir perdu pendant des siècles.

Dans l'histoire, il y eut bien René 1er le Bon (1409-1480), duc d'Anjou puis comte de Provence, mais ce ne fut pas, malgré ses bonnes dispositions artistiques, un saint. Le château d'Angers est un monument très visité. Il y eut aussi Renée de France (1510-1575), seconde fille de Louis XII et d'Anne de Bretagne qui se rallia à la Réforme, mais fut protégée par le pape Paul III. La première fille du couple, Claude de France (1499-1524), laide et boiteuse, délaissée par son mari François 1er, fut, elle, très aimée à cause de ses vertus et de sa pitié pour le peuple qui la surnomma la Bonne Reine. C'est en souvenir d'elle qu'une variété de prunes a été appelée Reine-Claude.

Mais voici qu'au début du XVIIème siècle, sous le règne d'Henri IV, à Saint-Martin-du-bois, diocèse d'Angers, actuel département du Maine-et-Loire, naissait René Goupil (1608-1642). Il fut un missionnaire français et le premier martyr nord-américain de l'Église catholique.

église St-Martin-du-Bois (49)

 

Baptême

Ayant étudié à Chantilly, près de Paris, il dut quitter le noviciat en 1639 en raison de sa surdité. Il connaissait déjà la chirurgie. Il se porta volontaire pour travailler comme ''donné'' avec les jésuites dans les hôpitaux du Canada. En 1640, Goupil est à la mission de Saint-Joseph de Sillery.

En 1642, lors d'un voyage par canot vers les missions huronnes avec le père Isaac Jogues, il fut capturé et torturé par les Iroquois. Après avoir enseigné le signe de la croix aux jeunes amérindiens, il fut tué par un coup de tomahawk sur la tête, et il prononça le nom de Jésus en mourant. Il se trouvait proche du site actuel d'Auriesville dans l'État de New-York (U.S.A.). Son décès a été rapporté dans les Relations Jésuites.

Il fut canonisé par Pie XI le 29 juin 1930 avec sept autres martyrs canadiens. Il est le patron des personnes sourdes et malentandantes. Vers 1950, des infirmières anesthésistes américaines désigneront René Goupil comme le patron de leur profession, parce qu'il est le premier canonisé parmi les travailleurs de la santé en Amérique du Nord.

Il y a une paroisse Saint René-Goupil dans le quartier Saint-Michel à Montréal, ainsi qu'un parc René-Goupil dans la même rue que l'église. Une autre paroisse René-Goupil se trouve dans le diocèse de Gatineau-Hull, et une autre dans l'état du Minnesota U.S.A.). Il y a aussi une rue nommée René-Goupil dans la ville de Saint-Jérôme (secteur Lafontaine), située en banlieue nord de Montréal. On retrouve aussi l'église Saint-René-Goupil dans la municipalité de Saint-René-de-Matane au Bas-Saint-Laurent.

Auriesville

Mais voici par le menu la vie de ce saint dont se réclament les René ou Renée de France et du Canada.

Où a-t-il appris sa chirurgie? Il serait possible que René Goupil ait reçu sa formation de chirurgien à Angers même, qui possède alors une faculté de médecine, une communauté de chirurgiens et l'hôpital Saint-Jean. Il serait allé à Orléans lors de son Tour de France en tant que compagnon-chirurgien. Ou bien, il serait possible que la ville d'Orléans se soit chargée de cette formation grâce à ses grand hospital et Maisondieu et Collège de maîtres chirurgiens. Quoi qu'il en soit, un événement est nécessaire: il devait être allé à Orléans.

D'ailleurs, c'est là que René Goupil serait devenu le camarade de celui qui le remplacera en Nouvelle-France après sa mort, François Gendron, un autre jeune chirurgien bien versé dans son art et bien connu dans l'Hôpital d'Orléans, où il a donné des preuves de sa vertu et de sa suffisance.

Deux faits sont certains : lors de son entrée au Noviciat jésuite de Paris le 16 mars 1639, il sait lire et écrire et il est déjà chirurgien.

René Goupil - Surdastre

Vers la fin de 1639, René Goupil doit quitter le noviciat jésuite de Paris à cause de diverses indispositions corporelles et aussi à cause d'un problème de surdité.

René Goupil a été renvoyé du noviciat de Paris, parce qu'il est surdastre

Renatus Goupil a tirocinio Parisiensi exclusus erat, quia surdaster

Dérivant du latin surdaster, surdastre et sourdastre sont de vieux mots français autrefois utilisés pour décrire une surdité partielle, comparable à celle des personnes vieillissantes.

Si René Goupil avait été complètement sourd, les Notices multiples auraient utilisé le mot latin surdus.

Il faut donc penser que René Goupil, au noviciat de Paris, n'est pas sourd mais plutôt surdastre, partiellement sourd, dur d'oreille, malentendant, pour des raisons passagères. Car il n'est plus fait mention de cette surdité après que René Goupil soit passé en Nouvelle-France.

Mais cette surdité, même partielle et transitoire, l'aura empêché de réaliser son plus grand désir : devenir jésuite au service de Dieu. Cependant il ne se décourage pas : il persévère et décide de venir œuvrer dans les missions jésuites du Nouveau Monde.

René Goupil : Sa vie en Nouvelle-France

Ne pouvant plus devenir membre de la compagnie de Jésus, René Goupil se transporte en Nouvelle-France par la seule flotte disponible, en 1640. Ancrée en face de Dieppe (France) avec tout son monde à bord, cette flotte de trois vaisseaux doit d'abord essuyer une tempête pendant plus d'un mois avant de pouvoir partir en fin d'avril. Après avoir échappé par deux fois à des frégates ennemies dans la Manche, elle atteint Tadoussac (Canada) aux derniers jours de juin. Et tous les passagers débarquent enfin à Québec au début du mois suivant.

 Immédiatement, René Goupil se met à la disposition des Jésuites qui ont déjà plusieurs missions établies en Nouvelle-France. Il n'existe pas encore de preuve à l'effet qu'il se soit donné à eux par contrat, bien qu'il se comporte comme un donné - oblatus.

À cette époque, le donné est un domestique laïc qui se lie au service des Jésuites, par contrat mais sans recevoir de salaire. Ces derniers s'engagent à pourvoir à ses besoin, l'utilisent comme homme à tout faire et peuvent aussi l'employer comme homme de métier s'il en a un. Le contrat en bonne et due forme de Goupil n'a pas encore été retrouvé. Aurait-il même existé ?

D'ailleurs de courte durée, cette institution des donnés n'avait jamais reçu une approbation enthousiaste des hautes instances européennes de la compagnie de Jésus.

René Goupil œuvre à Sillery et c'est le jésuite Paul le Jeune qui le révèle dans le Vieux Registre de Sillery ou Liber Baptizatorum alors que René Goupil devient le parrain d'un Amérindien le 30 décembre 1640.

Tout d'abord le 18 novembre 1640, Paul le Jeune baptise d'urgence un Amérindien du nom d'Atouré, sans toutes les cérémonies rattachées au baptême solennel.

En l'an du Seigneur 1640, le 18 novembre, moi, Paul le Jeune, prêtre de la société de Jésus, j'ai baptisé sans cérémonies, en danger de mort, un homme adulte, marié, dont le nom indigène était At8ré: je ne lui ai pas donné de nom.

Le symbole 8 représente le son amérindien OU.

Plus d'un mois plus tard, Paul Le Jeune, voyant les nombreux oublis faits par René Ménard lors de l'inscription des trois cérémonies du 30 décembre, biffe le tout et réécrit le baptême des deux Amérindiennes à la page suivante.

En ce qui concerne l'identité du domestique présent le 30 décembre lors des cérémonies complétées du baptême d'Atouré, Le Jeune viendra apporter les précisions nécessaires par cet ajout placé, entre deux lignes, après le baptême qu'il avait donné d'urgence à ce même Amérindien le 18 novembre:

Par la suite, il fut nommé René, lorsque les cérémonies furent complétées. René Goupil en fut le parrain.

C'est donc au cours des cérémonies du 30 décembre 1640 que René Goupil est devenu parrain.

Voici comment René Ménard avait originairement inscrit les cérémonies biffées par Paul Le Jeune:

En l'an du Seigneur 1640, le 30 décembre, moi, René Ménart, prêtre de la société de Jésus, j'ai baptisé avec les cérémonies dans l'église Saint-Joseph deux femmes (Mitchiganik8e...8r8aban8k8e). [...] Le même jour et à la même heure, cet homme adulte qui avait été baptisé le 18 novembre parce qu'on le croyait en danger de mort imminent, a reçu les cérémonies qui manquaient au rite du baptême. Il fut appelé René Atouré par le domestique.

 In extenso ci-dessous, les inscriptions du vieux Registre de Sillery:

Anno D(omi)ni 1640 die 18 Novembris, ego Paulus Le Jeune Societatis
Jesu Sacerdos baptizavi sine cæremoniis in periculo mortis vi(ru)m adultu(m)
matrimonio conjunctum nom(in)e patrio At8re, ei nullu(m) nomen impositu(m) est.
Postea Renatus dictus est, cum cæremoniae adhibitae sunt, patrinus Renatus Goupil.

[...]
Anno D(omi)ni 1640 die 30 decembris, ego Renatus Menart societatis
Jesu sacerdos baptizavi cum ceremoniis in ecclesia d(iv)i Josephi
mulieres duas (Mitchiganik8e... 8r8aban8k8e)
.
[...]
Ead(em) die et hora vir is adultus qui die 18 nove(m)bris in proximo et
credebati periculo mortis baptisatus fuerat, quae ad ceremoniaru(m) ritum defuera(n)t,
accepit. Appellatusque est Renatus Atoure a domestico.

 

René Goupil, parrain
Liber Baptizatorum, sous-série 2 US, folio 17 (demi-page inférieure)
Archives de l'archidiocèse de Québec, Sillery (Canada)
- Avec permission spécifique

Et durant deux années complètes passées à Sillery, René Goupil est domestique chez les Jésuites. De plus, il exerce la chirurgie à l'hôpital voisin.

René Goupil - Chirurgien

Et pour ne rien faire de son chef, quoi qu'il fut pleinement maître de ses actions, il se soumit totalement à la conduite du Supérieur de la Mission qui l'employa deux années entières aux plus vils offices de la maison, desquels il s'acquitta avec beaucoup d'humilité et de charité. On lui donna aussi le soin de panser les malades et les blessés de l'hôpital.

Comme le besoin d'un chirurgien devient beaucoup plus pressant à la mission que les Jésuites maintiennent chez les Hurons, Goupil accepte d'y aller après en avoir obtenu la permission de son supérieur jésuite.

On lui donna aussi le soin de panser les malades et les blessés de l'hôpital, ce qu'il fit avec autant d'adresse, étant bien intelligent en la chirurgie, que d'affection et d'amour regardant continuellement Notre Seigneur en leur personne.

Sillery vers 1650

René Goupil exerce ses talents de chirurgien auprès des Amérindiens à l'hôpital Saint-Joseph, maintenu par les Religieuses hospitalières de Dieppe (Augustines de la miséricorde de Jésus) et subventionné par la duchesse d'Aiguillon, nièce du cardinal Richelieu, à même les revenus de ferme de compagnies de transport comme les Coches et carrosses de Soissons, Orléans, Bourges, Tours et Bordeaux.

Il est alors question que ces religieuses établissent définitivement leur Hôtel-Dieu à Sillery plutôt qu'à Québec. Ainsi pourraient-elles se trouver tout près des Amérindiens qui se rassemblent en grand nombre à Kamiskoua-Ouangachit (Pointe-aux-Anguilles) pour y pêcher et boucaner l'anguille surtout durant septembre et octobre.

Ce voyage de plus de cinq kilomètres entre Sillery et Québec est très long et périlleux pour les grands malades dont plusieurs même mouraient en chemin. Ce qui les porta à nous demander instamment que nous [Hospitalières] allassions demeurer avec eux à Sillery.

Il n'est pas étonnant que des morts puissent survenir lors du transport des malades, les ambulances du temps prenant des raccourcis inattendus devant les aléas de la route.

Voyons un Sauvage qui traînait sa mère après soi sur la neige. Les chariots & carrosses de ce pays-ci sont des traînes faites d'écorce ou de bois, les chevaux sont des hommes qui les tirent après eux.

Voyons donc cette pauvre vieille liée sur une d'icelles. Son fils ne la pouvant commodément faire descendre par le sentier ordinaire d'une montagne qui borde la rivière où il allait, la laissa rouler à bas par l'endroit le plus raide, & s'en alla la requérir par un autre chemin.

Aussi en attendant qu'une décision soit prise quant à l'emplacement définitif de cet Hôtel-Dieu, l'hôpital de Québec avec ses six lits déménage ses quartiers à Sillery dans une petite salle, d'abord installée à la maison du sieur Puiseaux en fin d'août 1640 puis ensuite, le 1er décembre de la même année, au monastère des Hospitalières dont la construction est assez avancée hors palissade.

À ce nouvel endroit, ces Hospitalières auraient ouvert jusqu'à une quinzaine de lits grâce aux meubles nouvellement livrés par le navire du capitaine Cabot.

Pour distribuer près de quatre cent cinquante médecines et traiter jusqu'à trois cents malades par année à partir d'une salle trop exiguë, les Hospitalières doivent faire preuve d'imagination et d'ingéniosité, surtout lors des périodes d'affluence.

Comme à la clinique externe, les malades ambulants y vont pour recevoir leurs médecines et pour se faire purger ou saigner. Les Amérindiens ne souffrant aucune liste d'attente, ceux qui se présentent pour rester à l'hôpital sont admis en stat, malades ou non.

Il faut voir ces pauvres gens venant de la chasse, prendre logis dans la salle de notre Hôpital, & d'y passer plusieurs jours, avec une paix & une intelligence admirable. Leurs lits sont bientôt préparés, nous n'en avons précisément que ce qu'il en faut pour un petit nombre de malades. Ils jettent quelques bouts de peaux sur le pavé, & ayant fait leurs prières, ils dorment aussi bien là dessus que sur la plume & sur le duvet.

Quant aux autres malades, les religieuses vont les soigner à domicile, leur hôpital extra muros.

L'hygiène et la propreté n'ont pas leurs entrées dans ces cabanes amérindiennes où il y a tellement de fumée, de graisse et de saletés que les religieuses en reviennent toujours toutes salies et que leurs habits ne paraissaient plus blancs.

Force leur est donc de teindre leurs robes en gris, avec les moyens du pays, pour que n'y paraisse plus trop cette saleté incrustée malgré les lexives répétées. On prit donc de l'écorce de noyer avec du bois d'Inde que l'on mit bouillir ensemble ; cela fit une espèce de teinture toute semblable à la couleur des ramoneux.

 L'activité chirurgicale de René Goupil se résume surtout à saigner et à panser des plaies, dans un milieu très différent de ceux qu'il a connus.

Il suffit, par exemple, de comparer Sillery (Nouvelle-France) et Angers (France) à la même époque. Cette ville possède déjà un grand hôpital où plusieurs salles, spacieuses et bien meublées, peuvent accommoder les malades. (Cet hôpital est encore visitable de nos jours).

Tel un bon chirurgien d'Europe, il continue à saigner au bras. L'endroit étonne un peu les Amérindiens qui se scarifient eux-mêmes loco dolenti, comme au haut du front pour la céphalée, ne pouvant croire que pour guérir la tête, il faille saigner le bras.

Quelquefois, malgré les beaux pansements de Goupil, certaines plaies ne guérissent tout simplement pas. Diabète?

Lazare Petikouchkaouat a été sept mois dans notre hôpital, affligé de plaies très sensibles en plusieurs endroits de son corps, avec une fièvre qui le minait continuellement, & qui le brûlait si fort, qu'il ne pouvait étancher sa soif. Il fut pris d'une faim canine, en sorte qu'il ne pouvait se rassasier, il mangeait incessamment, & plus il mangeait & plus il desséchait.

Il vint en tel état que les os lui perçaient actuellement la peau. La pourriture se mit & dans ses os & dans sa peau, on eut mis une grosse noix dans quelques-uns de ses os découverts & tout cavés de pourriture. Ses ulcères étaient grands & profonds.

Il souffrait étrangement mais, avec une patience encore plus étrange, il se faisait lever tous les jours une fois, après un grand cri qu'il jetait par la violence des douleurs qu'on lui faisait en le touchant.

Il encourageait ceux qui le portaient, puis les remerciait avec beaucoup de douceur.

Il aimait notamment ce jeune homme qui s'est donné à notre hôpital pour secourir les pauvres malades [René Goupil]. Aussi faut-il confesser que ce bon jeune homme l'a secouru avec une charité qui ne se peut assez louer. Il appelait ce malade sa consolation.

Vous savez combien ce malade était puant - je n'ai jamais senti rien de si infect. Cependant son corps resta dans aucune mauvaise odeur après sa mort. Ce qui nous étonna.

Au printemps 1642, lors d'une visite de nuit à domicile, René Goupil réussit la réanimation d'un choc hémorragique.

Une troupe de Sauvages s'étaient retirés dans les bois pour faire des canots. Une pauvre femme tombe soudainement dans une si grande faiblesse qu'on la tient pour morte. Les Chrétiens commandèrent aussitôt à deux jeunes hommes de s'embarquer pour aller quérir un Père afin de la baptiser.

Il fallait voguer plus de trois lieues sur l'eau en pleine nuit. Les jeunes gens rament de toutes leurs forces, ils arrivent à Saint Joseph [Sillery] et demandent un Père avec empressement.

Le Père Buteux qui se trouva pour lors en cette résidence, prend avec lui un jeune Chirurgien [René Goupil], & court après sa proie.

Il arrive aux Cabanes environ une ou deux heures après minuit, trouve la malade sans pouls. Une grande évacuation de sang lui avait ôté les forces & la parole.

Le Chirurgien lui donne une potion cordiale, elle revient à soi. [...]

Le jour cependant s'approche & le Père voyant la malade hors de danger, demande qu'on le reporte à Saint Joseph pour dire la sainte Messe.

Comme Goupil assurait qu'elle n'en mourrait pas, le Père retarde le baptême de la ressuscitée jusqu'au retour de ces Amérindiens à Sillery et s'embarque avec les Nochers dans une écorce façonnée en gondole, Goupil comptant parmi les nautoniers.

D'après le dictionnaire de Trévoux, cette potion magique du temps versée par Goupil à sa malade devait probablement contenir les eaux cordiales des fleurs (bleues) de buglosse, bourrache et chicorée. À ces fleurs bleues, la pharmacopée française reconnaît des propriétés plutôt diurétiques et sudorifiques... de nos jours.

Tout comme les chirurgiens d'aujourd'hui, Goupil n'a rien à voir dans le diagnostic et le traitement des défluxions, maux de poitrine, asmes, rhumes, pleurésies bâtardes, crachements de sang, hydropisies, frénésies, fièvres ardentes, chaudes, pourprées ou pourpreuses: domaine de Robert Giffard, medecin du païs établi à Beauport (Québec, Canada) depuis 1634.

Seul ce dernier doit subir la concurrence des sorciers soignant par souffleries, sifflements, cris, chants et tambours. Si les malades ainsi traités cessent de manger ou bien ne guérissent pas au jour prédit par le sorcier, on les tue par compassion, pour ne pas les laisser languir inutilement ou... pour donner raison au sorcier.

Évidemment avant de faire venir le sorcier et pour ne pas tomber de fièvre en chaud mal, ils ont intérêt à boire force bouillons de raclures de diverses écorces, espérant ainsi retrouver la santé.

Pour se maintenir en forme, certains utilisent des massages à l'huile de loup marin... ce qui les rend fort fâcheusement puants à qui n'y est accoutumé. Ils vont aussi à la baignade en été... ce qui leur donne meilleure odeur.

Mais surtout, ils raffolent des sueries.

Ils dressent un petit tabernacle fort bas, entouré d'écorces, & tout couvert de leurs robes de peaux. Ils font chauffer cinq ou six cailloux qu'ils mettent dans ce four où ils entrent tout nus. Ils chantent là dedans incessamment, frappant doucement les côtés de ces étuves. Je les vois sortir tout mouillés de leur sueur. Voilà la meilleure de leurs médecines.

Cette médecine préventive ne va pas sans dangers ; il arrive que certains tombent sur les pierres chaudes et se brûlent une bonne partie du corps.

Indubitablement, les pansements de telles plaies relèvent de la compétence du chirurgien. Car pour la cure des plaies, les Amérindiens et leurs sorciers ne savent que sucer la blessure & la charmer, y apposant quelques simples au rencontre de la bonne aventure.

Durant son court séjour en Kanada, Goupil n'aura pas connu d'épidémies dignes de mention. Pas même celle de variole qui, après s'être répandue parmi les Amérindiens, s'est terminée à la fin de février 1640, quelques mois avant son arrivée.

Comme c'était la petite vérole, qui est une maladie fort sale, et que les Sauvages n'avaient point de linge, ils étaient très infects et cette corruption les avait tous pourris. Il se forma aussi des ulcères sur leur corps en de si grande quantité qu'on ne savait par où les prendre.

La petite vérole, par où le mal avait commencé, s'est changée dans une autre maladie qui les prenait à la gorge et qui les enlevait en moins de vingt-quatre heures. La mortalité fut si grande que le peu de Sauvages qui restaient s'en allèrent dans les bois et s'éloignèrent de notre hôpital qu'ils avaient en horreur. Ils le nommèrent la maison de mort, et ne voulaient plus y revenir.

Mais, voyant qu'ils mouraient aussi dans les bois et que la maladie avait fait mourir un grand nombre des Sauvages de Tadoussac, du Saguenay, des Trois-Rivières, des Iroquois, des Hurons, des Outaouais et de toutes les autres nations, ils revinrent de leur prévention et se rassemblèrent à Sillery de nouveau.

LA CAPTURE

Une flottille huronne de quarante personnes dont font partie René Goupil, Isaac Jogues et Guillaume Cousture (*), part des "3 rivieres le 1r d'Aougst" 1642 en suivant la rive nord-ouest du "grand fleuve de sainct Laurens." Elle dépasse l'actuelle ville de Berthier, QC, le 2 au matin, et se rend jusqu'à l'emboucheure de la petite rivière St-Joseph, située à quelques kilomètres plus loin, là où les éclaireurs hurons observent des traces de pas fraîchement imprimés sur la grève d'argile recouverte d'un peu de sable.

(*) J'aurai l'occasion de parler de Guillaume Couture ultérieurement et de vous raconter son incroyable destin.

"Il n'importe! dit Eustache Ahatsistari, vertueux capitaine huron fougueux, ils ne sont pas en plus grand nombre que nous; avançons & ne craignons rien."

"Vix milliare vnum," à peine un mille plus haut que cette petite rivière, tout ce beau monde impavide tombe dans une embuscade tendue par soixante-dix Agniers guerriers [les Mohawk Warriors de nos jours] qui les attendent justement de chaque bord du St-Laurent, s'y rétrécissant à cet endroit stratégique.

St-Laurent

Et là s'arrête leur beau voyage vers la Huronie!

"L'ennemy caché dans des herbiers & dans des brossailles, s'esleve avec une grande huée, deschargeant sur nos canots une gresle de balles. Le bruit de leur arquebuze effara si fort une partie de nos Hurons, qu'il abandonnerent leurs canots & leurs armes, & tout leur equipage, pour se sauver à la fuitte dans le fond des bois."

Les Iroquois pourchassent les fuyards, les ramènent sur la grève et malmènent leurs prisonniers. Ceux qui ne sont pas tués, sont transportés, avec le butin saisi, sur la rive sud du St-Laurent vers un fort que ces Iroquois ont bâti environ une lieuë plus haut que l'embouchure de leur rivière, là où se trouve l'actuel Monastère des Moniales Clarisses de Sorel-Tracy, QC.

LES FIGURES

Durant la petite fête et le partage du butin qui se tiennent au fort iroquois, un artiste Kanienkehaka en profite pour griffonner le visage des victimes sur les arbres environnants [le mot iroquois Kanienkehaka veut dire Agnier en français, Agnierrhonon en huron, Mohawk en anglais, ou Maqua en hollandais].

Ces Iroquois ont pris l'habitude de se servir des arbres pour raconter leurs hauts faits d'armes: "...Ces Barbares remontans en leur pays, dépoignoient leurs victoires sur les arbres qui bordoient l'emboucheure de leur Riviere. Ils plantoient sur ses rives les testes de ceux qu'ils avoient massacrez. Ils griffonnoient le visage de leurs prisonniers. La figure du pauvre Pere Isaac Jogues, y paroissoit entre les autres, & maintenant on y voit le grand Estendart des predestinez. C'est une haute Croix, que Monsieur le Gouverneur fit élever sur les ruines de leurs trophées, justement le jour de l'Exaltation de la Saincte Croix [14 septembre], avec une piété & une consolation tres-sensible de nos François, In hoc signo vinces. Jesus-Christ sera notre victoire..."

N.B. : 14 septembre : l'église du Conquet (29) est placée sous le vocable de la Sainte-Croix.

Il faut se souvenir que le Gouverneur de la Nouvelle-France, Charles Huault de Montmagny, est venu fonder le 13ème iour d'Aouft l'actuelle ville fusionnée de Sorel-Tracy à l'emboucheure de la rivière des Hiroquois, en y construisant un "Fort de Richelieu" nommé ainsi par les contemporains de ce temps-là. En fin de construction de ce fort dit "de Richelieu" en ce lieu dit "Richelieu", les soldats-charpentiers sont attaqués, repoussent les Iroquois et les pourchassent jusqu'à leur fort à eux, où ils découvrent avec étonnement des arbres avec leurs affiches et cette figure qui "y paroissoit entre les autres."

Capture et figures

La bonne Mère Marie de l'Incarnation, dans son silence cloîtré, apporte des données nouvelles, plus détaillées et des interprétations quelque peu différentes au sujet de cet affichage: "On a trouvé au même lieu douze têtes peintes en rouge qui est une marque que ceux-là seront brûlez, six autres peintes en noir, qui est un indice que ceux-cy ne sont pas encore condamnez, et une seule élevée au dessus des autres, qu'on croit être celle du bon Eustache grand Capitaine Huron, qui avoit été baptisé depuis peu de temps, et qui avoit fait merveille, pour soutenir notre sainte Foy. C'étoit le plus grand ennemi des Hiroquois, et qui remportoit souvent des victoires sur eux... Notre Thérèse non plus que son Cousin n'étoit point peinte comme les autres; c'est une marque qu'ils ne sont plus liez, et qu'ils la garderont libre parmi eux. Pour le reste des vingt-sept on croit qu'ils ont été brûlez; l'on n'en recevra des nouvelles certaines que par quelques fugitifs: car tout ce que je viens de dire nous a été rapporté par quatre femmes qui se sont sauvées d'un grand nombre d'Algonguins qui furent pris l'hiver dernier par les Hiroquois. Ils tuèrent tous les hommes et réservèrent environ vingt femmes pour remplacer un pareil nombre des leurs, que les Algonguins avoient fait mourir peu de temps auparavant." Mère Marie de l'Incarnation fait connaître ses sources de renseignements dans la lettre susdite qu'elle écrit à sa supérieure de France.

Après ce court arrêt pour la pose chez l'artiste et le partage du butin saisi, les modèles sont priés sans pitié de partir vers l'Iroquoisie, pays de leurs vainqueurs localisé dans le nord de l'actuel État de New York (U.S.A.). Tant en chemin qu'en début de captivité, ces prisonniers de guerre sont caressés par moult bastonnades, arrachages des ongles, mâchures des doigts avec ou sans amputations, brûlures des parties sensibles, garrottages, scalpements, taillades de chair et autres câlineries semblables.

Comme tout captif fait par les Amérindiens, René Goupil connaît ces belles caresses réservées aux prisonniers de guerre.

Il endura tous ces outrages et ces cruautés avec grande patience et charité à l'endroit de ceux qui le mal traitaient. Tout blessé qu'il était, il pansait les autres blessés tant des ennemis qui dans la mêlée avaient reçu quelque coup que les prisonniers mêmes. Il ouvrit la veine à un Iroquois malade, et tout cela avec autant de charité que s'il l'eût fait à des personnes fort amies.

À son arrivée au premier village iroquois, on pousse même la câlinerie jusqu'à lui amputer un pouce avec le tranchant d'une écaille d'huître. Le seul antalgique que ce chirurgien peut alors s'offrir ressemble fort à de l'auto-hypnose par mélopée répétitive.

On s'adresse à lui et lui coupe-t-on le pouce droit à la Ière jointure disant incessamment durant ce tourment IESUS MARIA JOSEPH.

Comme Goupil ne se montre pas assez vigoureux et costaud pour qu'une famille iroquoise puisse l'adopter, on décide de le mettre à mort si on ne l'échange pas avec les Français.

En attendant une décision finale, il est laissé en garde au clan de l'Ours qui peut en disposer à sa guise.

Le 29 septembre, sur commandement de son oncle, un jeune guerrier iroquois de ce clan abat Goupil à coups de hache sur la tête.

Son corps est ensuite laissé comme jouet aux autres jeunes qui le traînent la corde au col jusqu'en dehors du village pour, à la fin, l'abandonner en le cachant dans un petit bois proche où l'automne et l'hiver les Chiens, les Corbeaux et les Renards le mangent.

Ce n'est qu'au printemps suivant que le Père Jogues, toujours en sursis de mort, peut enfin enterrer, dans ce même petit bois situé tout près du village, sa tête et quelques os demi rongés.

Ces derniers événements sont survenus à Ossernenon, un village iroquois fortifié situé sur la rive sud de la rivière Mohawk à l'ouest de l'actuelle ville d'Albany, capitale de l'État de New-York (U.S.A.).

 

 De nouveaux travaux archéologiques entrepris par des équipes de l'Université de l'État de New York à Albany NY, positionnent plus précisément ce village (datant de 1635-1646) à un site archéologique, nommé Bauder, récemment trouvé près du Yatesville Creek (affluent de la Mohawk), une quinzaine de kilomètres plus à l'ouest d'Auriesville NY.

Les archéologues qui ont étudié ce site le décrivent ainsi: localisé dans la municipalité Root, comté Montgomery, le site Bauder est à l'est de la route Currytown sur un éperon de terre surplombant le ravin Yatesville à plus de 1,5 kilomètre de la rivière Mohawk. Couvrant un espace de 8700 mètres carrés, il semble avoir été occupé durant toute la période de 1635 à 1646, soit 11 ans. Cette occupation a suivi les relocalisations forcées par l'épidémie de petite vérole de 1634 et la décimation de la population de deux villages qui ont dû se fusionner pour survivre.

Ce site archéologique Bauder se trouve en terrain privé interdit aux visiteurs. Encore aujourd'hui, il persiste quelques petits lopins de boisés aux environs de ce site.

 Dans la vallée Mohawk, bien d'autres sites archéologiques existent. Ils proviennent de la recherche d'équipes d'anthropologues universitaires sous la gouverne d'hommes compétents, brillants et patients.

Certains de ces sites archéologiques coïncident assez bien avec les noms cités par les écrits et des Jésuites et des Hollandais, quant aux dates et quant aux lieux.

Mais pour ce, il faudrait accepter le fait que le Père Jogues ait enterré la teste et quelques os demy rongés de René Goupil dans un petit bois proche du site Bauder.

René Goupil - Martyr

Tel que consigné dans le Mémoires de 1652 ou MS-1652, le père jésuite Isaac Jogues donne déjà à René Goupil le titre de martyr particulièrement parce qu'il a été tué pour les prières et nommément pour la sainte Croix.

Il était dans une Cabane où il faisait presque toujours des prières ; cela ne plaisait guère à un vieillard superstitieux qui y était.

Un jour voyant un petit enfant de 3 ou 4 ans de la cabane, par un excès de dévotion et d'amour à la Croix et par une simplicité - que nous autres qui sommes plus prudents selon la chair que lui, n'eussions pas faite - ôta son bonnet et le mit sur la tête de cet enfant.

Il lui fit un grand signe de croix sur le corps.

Ce vieillard voyant cela commande à un jeune homme de sa cabane qui devait partir pour la guerre de le tuer: ce qu'il exécuta comme nous avons dit.

La mère même de l'enfant dans un voyage où je me trouvai avec elle, me dit que c'était à cause de ce signe de Croix qu'il avait été tué.

Et le vieillard qui avait fait le commandement, un jour qu'on m'appela dans sa cabane pour manger, comme je faisais le signe de la Croix devant, me dit : Voilà ce que nous haïssons, voilà pourquoi on a tué ton compagnon et pourquoi on te tuera. Nos voisins les Européans [Hollandais] ne font point cela.

Quelquefois aussi comme je priais à genoux durant la chasse, on me disait qu'on haïssait cet façon de faire pour lesquelles on avait tué l'autre Français, et que pour cette raison on me tuerait, quand je reviendrais dans le Bourg.

Tel est le témoignage d'Isaac Jogues, compagnon d'infortune de René Goupil.

 

René Goupil - Jésuite

René Goupil est maintenant sûr que sa mort est proche et il aimerait bien réaliser son plus grand désir, celui de devenir membre de la compagnie de Jésus.

 Il demande donc au père Isaac Jogues, qui acquiesce, de prononcer ses vœux de jésuite.

Mon père, Dieu m'a toujours donné de grands désirs de me consacrer à son service par les vœux de la religion en sa Ste Compagnie ; mes péchés m'ont rendu indigne de cette grâce jusqu'à cette heure.

J'espère néanmoins que Notre Seigneur aura pour agréable l'offrande que je lui veux faire maintenant et faire en la façon la meilleure que je pourrai, les vœux de la Compagnie en la présence de mon Dieu et devant vous. Lui ayant accordé, il les fit avec beaucoup de dévotion.

 L'année qui suit la mort de Goupil, le père Jogues réussit à s'échapper des Iroquois pour aller se réfugier chez les Hollandais qui le cachent et veulent le rapatrier en Europe. Il en profite alors pour écrire en latin une longue lettre datée du 5 août 1643 et adressée à son supérieur de France, le père Jean Filleau, provincial de la compagnie de Jésus. Après lui avoir raconté en détails tout ce qui leur est survenu, il lui apprend les vœux prononcés, en sa présence, par René Goupil et demande qu'il soit considéré comme jésuite :

C'était un homme de trente-cinq ans, admirable par la simplicité, l'innocence de la vie et la patience dans l'adversité, parfaitement soumis par amour à Dieu, qu'il voyait toujours très présent en toutes choses, et à sa très sainte volonté. Il est digne en vérité, mon Révérend Père, d'être reconnu par vous comme l'un des vôtres, non seulement parce qu'il avait passé plusieurs mois avec satisfaction au noviciat de la Compagnie et que, sur l'ordre des supérieurs, à la conduite desquels il s'était remis tout entier, il allait chez les Hurons pour secourir les chrétiens dans le métier de chirurgien qu'il avait appris; mais surtout parce que, quelques jours avant sa mort, poussé par le désir de s'unir davantage à Dieu, ayant prononcé les vœux de la Compagnie, il se donna à elle, autant que cela lui était possible. Et certes, tant dans sa vie que dans sa mort, où il prononça comme dernière parole le Nom de Jésus, il s'est montré véritable fils de la Compagnie.

Transporté en Angleterre par les Hollandais l'année suivante, Jogues se rend en France où il rencontre enfin le père Filleau.

Isaac Jogues revient en Nouvelle-France et, avant de retourner chez ces mêmes Iroquois, il écrit un narré dans lequel il raconte les vertus et la mort de René Goupil. Ce narré, il le fera parvenir à son supérieur de Nouvelle-France dans sa lettre du 2 mai 1646.

 Le jésuite Paul Ragueneau se sert de ce narré pour écrire le chapitre intitulé: Le Martyre de René Goupil par les Iroquois, dans le Mémoires de 1652 dont il est le maître d'œuvre.

Dans ce même MS - 1652 ou Manuscrit de 1652, René Goupil est déjà considéré comme un séculier ou coadjuteur temporel avec certaines tâches apostoliques, et il est associé aux Pères de la compagnie de Jésus dont la mort et les vertus sont exceptionnelles et dignes de mention.

 La première lettre du père Jogues, datée du 5 août 1643 et adressée à son supérieur de France, n'est pas restée lettre morte puisqu'elle est envoyée - probablement avec recommandations très particulières et spéciales - à Rome où elle est copiée in extenso par les pères jésuites Philippo Alegambe et Ioannes Nadasi dans leurs "Mortes illustres et gesta" (publiés en 1657) qui relatent, avec la permission de leurs supérieurs, les morts illustres des Jésuites qui ont donné leur vie pour leur foi. La même année, Ioannes Nadasi publie aussi un Mortes Illustres mais sans cette lettre.

Comme il est mentionné au début de la table des matières, seul un Père jésuite voit son nom précédé de la lettre majuscule P. Les autres jésuites sont ou bien des Scholastiques ou bien des Coadjutueurs.

À la table des noms où René Goupil apparaît sans P., le renvoi indique la page 235.

Le novice René.

À son sujet, dans sa missive du 5 août 1643, [page 236] le P. Isaac Jogues dit; il fut tué d'un coup de hache, alors qu'il répétait le SAINT nom de JÉSUS. Il le loue pour sa simplicité, son courage incroyable à supporter les douleurs, son innocence. Il a passé avec succès plusieurs mois dans le noviciat de la Société, de là il a été envoyé chez les Hurons, afin d'aider les Chrétiens puisqu'il excellait comme chirurgien. Une femme avec le P. Isaac raconta des faits étonnants sur ces Barbares cruels. Il est mort sur l'ordre d'un certain vieillard, pour avoir tracé, avec un doigt de sa main sur le front de son neveu, le signe de la sainte Croix; et c'est ce signe qui est la cause de sa mort comme l'a révélé la Mère de l'enfant qu'il avait béni. Il le nomme martyr de l'obéissance, de la foi, & de la Croix. Enfin il se voit courir derrière lui qui est déjà rendu au ciel, [page 237] en train de contempler des palais d'une splendeur admirable.

 

À titre posthume, Alegambe et Nadasi redonnent donc à Goupil son ancien rang de novice parmi les autres scholastiques et coadjuteurs jésuites de la compagnie de Jésus, après en avoir obtenu l'autorisation nihil obstat de leurs Supérieurs. SVPERIORVM PERMISSV.

Portrait

Et depuis, René Goupil est toujours considéré comme un frère jésuite, à part entière.  Il vient d'être proposé comme modèle aux Frères jésuites.

 Depuis 1998, le Comité national des frères jésuites présente René Goupil comme chirurgien et frère jésuite dont la très grande disponibilité apostolique mérite d'être imitée.

 Même si saint Alphonse Rodriguez est le saint patron des Frères jésuites, plusieurs d'entre eux prient aussi saint René Goupil de les aider durant les tâches qui leur sont les plus difficiles à remplir.

 En 2007, ce même Comité offre un porte-clés avec breloque montrant, d'un côté, l'image de saint Alphonse Rodriguez et de l'autre, celle de saint René Goupil.

René Goupil - Saint

Le pape Pie XI canonise René Goupil en 1930 avec sept autres martyrs jésuites de la Nouvelle-France: Isaac Jogues, Jean de Brébeuf, Gabriel Lalemant, Antoine Daniel, Charles Garnier, Noël Chabanel et Jean de La Lande.

En 1940, ces saints jésuites sont reconnus par l'Église comme patrons secondaires du Canada.

En tant que saints Martyrs canadiens, ils ont leur sanctuaire près de Midland (Ontario, Canada). Tout près, se trouve Sainte-Marie au pays des Hurons.

La fête de saint René Goupil et autres saints martyrs jésuites de la Nouvelle-France, se célèbre le 19 octobre. Mais c'est le 26 septembre qu'on les commémore au Canada pour des raisons pastorales.

En 1997, l'église de Saint-Martin-du-bois (49), où René Goupil est né, devient l'un des six clochers d'une nouvelle paroisse agrandie, qui englobe un total de 15 relais paroissiaux : Cette nouvelle paroisse porte le nom de Saint-René-Goupil-en-pays-segréen.

fonts baptismaux

Le 19 octobre 1998, fête du patron de cette nouvelle paroisse agrandie, le Musée des Beaux-Arts d'Angers remet à l'église de Saint-Martin-du-bois les fonts baptismaux sur lesquels René Goupil est rené de l'eau et de l'Esprit.

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